« On sait très peu de choses sur la première église Sainte-Thérèse, érigée en 1922, autre qu’elle a été bâtie en même temps que sa paroisse fut créée », explique Marie-Ève Gingras du Musée d’histoire de Sherbrooke.
Elle poursuit : « Dans les années 1900, Sherbrooke comptait environ 11 125 habitants. En 1922, le chiffre avait plus que doublé pour atteindre 24 000 ». La bourgeonnante ville de Sherbrooke avait besoin de nouvelles paroisses pour rassembler les nouveaux arrivants, majoritairement des ouvriers. À cette époque, 75 % de la population était franco-catholique et fréquentait assidument les églises de la région.
C’est le 12 avril 1922 qu’elle ouvre officiellement ses portes et que Monseigneur Paul-Stanislas Larocque accueille ses premiers disciples pour célébrer messes, baptêmes et mariages.
Quelques années plus tard, en 1938, l’église est victime d’un important incendie et devra être partiellement reconstruite. On confie la tâche à l’architecte Denis Tremblay, qui revoit les plans de l’église et change sa façade de côté. Il est aidé par un certain Louis-Napoléon Audet, grand architecte québécois à qui on doit de nombreuses constructions religieuses dans la province, dont la fameuse basilique-cathédrale Saint-Michel de Sherbrooke.
Les deux s’inspirent des réalisations au style moderne et contemporain de Dom Bellot, un religieux et architecte français ayant travaillé autant sur le vieux continent qu’ici, au Québec. Parmi ses plus grandioses réalisations, notons le dôme de l’oratoire Saint-Joseph à Montréal et la façade de l’abbaye Saint-Benoît-du-Lac.
En 1952, l’église reprend du service et reçoit à nouveau ses nombreux fidèles. On est alors à l’ère duplessiste, et la religion catholique est on ne peut plus présente dans les ménages québécois. Selon les informations du Musée d’histoire de Sherbrooke, la ville compte alors 55 000 habitants, dont plus de 75 % se disent catholiques.
L’église Sainte-Thérèse-d’Avila connaît ses plus belles années entre 1950 et 1965. La religion est alors considérée comme un « ciment social », explique Marie-Ève Gingras. « On dira ce qu’on voudra de la religion catholique, mais dans le temps, c’était comme ça que les gens se rassemblaient et venaient à s’entraider ».
Le temps passe et les nouvelles générations sont moins pratiquantes que celles de leurs parents et grands-parents. Les églises se vident, mettent la clé sous la porte… et certaines sont vendues. En 2000, l’église Sainte-Thérèse-d’Avila remballe ses cierges, son calice et son ciboire et ferme définitivement ses portes. Une page d’histoire est tournée dans le diocèse de Sherbrooke.
« Cela n’avait créé une si grande onde de choc », se souvient Marie-Ève Gingras. Le déclin de la fréquentation des églises s’étant échelonné sur plusieurs décennies, ce n’était une surprise pour personne que de les voir fermer l’une après les autres.
« Les Québécois entretiennent une relation mitigée avec les bâtiments religieux. Ils les trouvent beaux et font partie intégrante du patrimoine québécois. Même s’ils ne sont plus fréquentés, ils ne veulent pas les voir disparaître du paysage. C’est un attachement culturel plutôt que religieux », tente-t-elle d’expliquer.
Si certaines églises sont démolies, d’autres se voient donner une nouvelle vocation.
Peu de temps après sa fermeture, André L’Espérance, homme d’affaires de la région spécialisé en tourisme, met la main sur ce petit bijou d’architecture et promet d’en faire bon usage. Son but? Mettre les talents de la région en valeur, tout en valorisant le cachet historique du bâtiment.
Après avoir reçu pendant quelque temps les bureaux administratifs de PAL+, le groupe touristique qui possède notamment le bateau de croisière Le Grand Cru et les hôtels Espace 4 Saisons et Versō, l’église se transforme en restaurant. Est né le OMG Resto, un projet novateur et ô combien impressionnant, où les produits régionaux volent la vedette sur le menu!